La Chute du Droit Naturel« L’affaire Jacques Baud »,symptôme d’un basculement de civilisation
- Thémisia Gioia
- il y a 2 jours
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Par Michelle CaillerJuriste, Fondatrice de Themisia Gioia (www.themisia-gioia.org)
Quand la loi perd son intégrité

L’affaire Jacques Baud dépasse le cadre d’un simple scandale politique ; elle met en lumière une rupture profonde dans notre relation au droit et à la vérité.
Un citoyen suisse, ancien colonel, expert reconnu au sein de l’ONU et collaborateur de l’OTAN, est soumis à des sanctions financières et à une interdiction de territoire par l’Union européenne, non pas en raison d’actes criminels, mais à cause de ses analyses sur le conflit en Ukraine. Aucune procédure judiciaire, aucune audience, aucun juge, aucune défense véritable : une simple décision administrative lui enlève ses revenus et ses droits fondamentaux.
D’un point de vue juridique traditionnel, cela enfreint déjà des principes fondamentaux tels que :
• le droit à être entendu,
• la présomption d’innocence,
• le droit à un recours effectif.
Cependant, au-delà du droit positif, une menace plus grave pèse sur la légitimité de l’ordre juridique.
Lorsque la loi ne sert plus la justice, elle devient un outil de pouvoir au service de l’oppression.
Droit naturel face à la loi de la force
La tradition du droit naturel, qui va d’Aristote à Rousseau en passant par le jusnaturalisme moderne, rappelle une vérité essentielle : il existe des droits qui ne sont pas octroyés par l’État, mais qui émanent de la dignité humaine elle-même.
Parmi ces droits figurent :
• le droit à la vérité (ou, au minimum, à la quête authentique de la vérité),
• le droit à la liberté de pensée et d’expression,
• le droit de ne pas subir de pertes économiques en raison de ses opinions.
Sanctionner un homme parce qu’il propose une lecture différente d’un conflit, fondée sur des sources occidentales publiques, ce n’est pas « lutter contre la désinformation », c’est « criminaliser la diversité d’opinion ».
À partir de là, nous ne sommes plus dans un État de droit au sens fort du terme, mais dans un système qui utilise la forme juridique pour imposer un récit officiel.
Le message sous-jacent est limpide :« Tu es libre de penser… tant que tu partages notre point de vue. »
La Suisse : de rempart des libertés individuelles à complice muette
La Suisse a historiquement été bâtie sur une compréhension proche du droit naturel : des droits jugés inaliénables, une méfiance à l’égard des autorités centrales, et une forte souveraineté populaire.
Face à la sanction infligée à un citoyen suisse par une puissance étrangère, sans procès ni défense, quelle est la réaction du Conseil fédéral ?
Il choisit le silence.
Ce silence n’est ni neutre ni anodin. Il signifie en creux :
qu’un État étranger peut détruire la vie d’un Suisse pour ses idées,et que le gouvernement suisse n’ose plus le défendre.
Pourquoi cette inaction ? Parce que la Suisse se retrouve désormais piégée dans un cercle vicieux :
• 50 à 60% de la législation suisse est d’ores et déjà influencée ou alignée sur le droit européen ;
• les accords bilatéraux III prévoient une adoption dynamique (comprendre « automatique ») du droit de l’UE, avec des mesures de rétorsion (nommées «compensation») en cas de refus.
Autrement dit : plus la Suisse s’aligne, moins elle peut invoquer ses propres principes.
Un État qui n’ose plus défendre ses citoyens par crainte d’un partenaire économique a déjà sacrifié une part essentielle de sa souveraineté.
Le nouveau blasphème : penser autrement que l’OTAN
Le point philosophique central est le suivant : la pensée stratégique indépendante devient un tabou politique.Ce que l’on reproche à Jacques Baud n’est pas de mentir, ni d’inventer des faits, ni d’appeler à la haine, mais :
• de contester la narration dominante sur l’Ukraine,
• d’expliquer que certaines décisions occidentales prolongent la guerre,
• de rappeler que la réalité militaire ne s’aligne pas nécessairement avec le discours politique.
Dans une société en bonne santé, un tel point de vue serait entendu dans les parlements, relayé par les médias, et intégré au débat public précisément parce qu’il dérange. Dans le système qui s’installe, il est puni.
Cette inversion est typique d’un monde qui renonce à la recherche de la Vérité pour se réfugier dans la gestion du récit dominant.
La question n’est plus : « Est-ce vrai ? »,mais : « Est-ce conforme à la ligne ? ».
Le point de vue de Themisia Gioia : pourquoi cette affaire est un signal d’alarme ?
La vision de Themisia Gioia est de restaurer la dignité humaine par le biais de la justice, de la culture et de la conscience.Dans ce contexte, l’affaire Baud ne peut être considérée comme un simple dossier parmi d’autres :
c’est un véritable test de civilisation.
Elle met en lumière plusieurs dérives préoccupantes :
• le passage du délit d’action au délit d’opinion ;
• le passage du droit comme protection au droit comme arme ;
• le passage de la souveraineté affirmée à la soumission silencieuse.
Ce qui est en jeu dépasse la seule personne de Jacques Baud :
• c’est le droit pour chacun d’entre nous de penser à contre-courant sans risquer la mort civile et sociale ;
• c’est la capacité d’un petit pays comme la Suisse à rester fidèle à ses principes face à des pressions géopolitiques contraires.
Un ordre juridique qui ne se laisse plus guider par la justice, la vérité et la conscience est un ordre qui commence à se décomposer.
C’est précisément ici que commence le travail de conscience civique :
Oser identifier cette décomposition et refuser d’y participer.
Un appel fondé sur les faits observables, loin de toute idéalisation romantique.
Défendre les droits inaliénables et le respect de l’intégrité de la personne n’est pas abstrait : c’est une question d’ordre pratique et observable, car cela touche directement à la manière dont les vies réelles sont, soit détruites, soit préservées.
À partir de cette affaire, trois exigences s’imposent :
- Exiger du Conseil fédéral une prise de position claire sur la sanction de Jacques Baud et sur la compatibilité de ce type de mécanisme avec les valeurs suisses.
- Rejeter, tant par le dialogue que par le vote, tout accord qui placerait le droit européen au-dessus du jugement éthique et politique du peuple suisse (Bilatérales III).
- Apporter soutien à ceux qui, comme Baud, subissent les conséquences de leur liberté d’expression : les lire, les inviter et les défendre lorsqu’ils sont victimes de diffamation ou de sanctions.
Il ne s’agit pas uniquement d’un combat juridique. C’est un combat pour que le droit retrouve son essence : être un service à la vérité et à la dignité humaine, et non un outil de répression pour les esprits indépendants.
La dignité humaine n’est pas un concept, c’est un acte. C’est le refus de participer à l’injustice, même lorsque le silence est plus confortable.
La liberté d’expression en est l’armature : elle permet à chacun d’affirmer sa conscience sans craindre d’être écrasé pour ses idées.
L’affaire Baud nous rappelle que la vraie Suisse n’existe que si nous la défendons activement. Themisia Gioia existe précisément pour cela : restaurer ce qu’on croyait perdu, réveiller ce qu’on croyait endormi.





